L'adieu à Jacques Marchais !
Vieille figure du centre-ville lavallois, Jacques Marchais y a longtemps déambulé à la recherche d'un interlocuteur susceptible de discuter avec lui de politique et d'histoire de France. Pour sa messe de sépulture, sa soeur Nono m'a demandé d'écrire le petit hommage suivant qui, bien sûr, n'intéressera que ceux qui appréciaient "l'gars Jacques"...
Le Général
« Ah, si le Père de Gaulle revenait au pouvoir ! » « Ah, si le Général était encore là ! » « Ah, si le Grand Charles ! », etc.
Nous n’entendrons plus Jacques Marchais évoquer son Grand Homme, celui du 18 Juin et de Colombey-les-Deux-Eglises, de la Croix de Lorraine et de la 5e République, ce De Gaulle qu’il vénérait 24 h/24, 365 jours par an… Car l’homme qui vient de nous quitter mercredi dernier, était de ceux – de plus en plus rares – que l’Histoire de France habitait, captivait, enflammait et structurait… Surtout quand le Général était dans le coup !
Ah, on peut dire que - contrairement à notre pays aujourd’hui – Jacques Marchais n’avait pas, lui, de problème d’identité nationale ! Seulement des problèmes de fin de mois et, ces dernières années, des problèmes de santé. Pourquoi « seulement » ? Parce que Jacques, même dans les pires situations personnelles, continuait, comme si de rien n’était, de commenter les actualités pourvu qu’elles concernassent son pays ou sa ville natale…
Une grande curiosité
Cette distance à l’égard de ses tracas personnels, n’était pas seulement le fruit d’une grande curiosité (tout l’intéressait !), c’était aussi de la politesse à l’égard de ses interlocuteurs… Car Jacques, ce n’est un secret pour personne, avait besoin d’interlocuteurs, de contacts, il lui fallait rencontrer des gens, parler avec des êtres humains, pas avec des ordinateurs ou je ne sais quel facebook ! C’est pourquoi, tout pendant que sa santé et ses jambes le lui ont permis, il se promenait chaque jour dans le centre-ville de Laval à la recherche d’un compagnon, d’un ami ou d’une simple relation avec qui tailler une bavette…
Parfois nous nous arrêtions discuter avec lui, c’était les jours où nous avions du temps devant nous ; parfois nous lui disions : « Non Jacques excuse-moi, j’ai du travail… » Il faut dire que quand il était lancé sur un sujet, ce n’était pas toujours facile de l’arrêter… Bien qu’il n’ait point fait de longues études, dans son genre, c’était un lettré, surtout en histoire de France, j’y reviens, une passion décuplée par le fait d’avoir perdu un grand-père, le père de sa mère, Monsieur Fauveau, tué au champ d’honneur le 24 août 1914…
Les petites histoires
En souvenir de ce grand-père vénéré, Jacques n’aurait jamais raté un « 11 Novembre », square Foch ou ailleurs…Mais Jacques n’aimait pas seulement la Grande Histoire avec un H majuscule, il aimait aussi les petites histoires, celles qu’on ne peut évoquer en ce lieu ; c’était là un trait qu’il partageait avec le parrain que lui et moi avions en commun, un ancien quincaillier de Laval décédé en 1999, un autre Jacques, Cormerais celui-là…
Jacques Marchais était également un amateur de bons mots et de citations. Celle de Jaurès, « les pauvres n’ont que leur patrie », lui plaisait particulièrement. Mais attention ! Jacques Marchais n’était pas pauvre, car il n’avait pas que sa patrie ; il avait aussi son fils Edouard, sa sœur Nono, sa sœur Marie-Thérèse, les autres membres de sa famille, ses amis et, longtemps, sa chère maman rappelée à Dieu dans sa 102e année.
Comptable chez Hardy
Il avait aussi d’autres passions comme la politique (c’était un militant toujours prêt comme les scouts) ; le chant (qu’il avait pratiqué à la Lyre Saint-Tugal et à la chorale Caillère) ; le football qu’il avait longtemps suivi de très près tout de noir vêtu, comme arbitre…
Jacques c’était aussi un Lavallois de chez Lavallois comme on dit maintenant, un Lavallois qui vit le jour rue de Bretagne, le 8 janvier 1950.
Il fut scolarisé à deux pas d’ici, dans l’ancienne école Notre-Dame, puis à l’Immaculée. Après son service national à Châteaudun, il entre comme comptable chez Hardy devant le square Foch puis s’expatrie à Redon, expérience qui – hélas - se soldera par le drame du chômage. Ensuite, il travaillera dans différentes villes et reviendra à Laval où quelques amis l’aideront du mieux qu’ils pourront à retrouver un emploi…
Comme nombre de ses concitoyens du secteur privé, Jacques Marchais a professionnellement connu des moments difficiles mais il a toujours su garder sa curiosité, son bon sens, son humour, sa gaieté, sa gentillesse… Ce sont ces traits de caractère qui nous manqueront quand maintenant nous penserons à lui…
Un chrétien
Enfin, pour conclure ce petit portrait, signalons que c’était un chrétien de toujours très attaché à la Vierge en général et à celle des Cordeliers en particulier…
Contrairement à beaucoup, il n’a jamais abandonné la pratique religieuse et savait mieux que personne ce que la France – toujours elle ! – doit à la religion de nos pères… Sa foi l’a maintes fois soutenu dans les épreuves de la vie, prions pour qu’elle le sauve aujourd’hui et – surtout, surtout - qu’elle lui offre une place de choix là-haut, près du Seigneur bien sûr, mais, si possible entre son grand-père Fauveau et son Général préféré….