Laval sous Francis Le Basser
Pour définir le sénateur-maire Francis Le Basser, citons son successeur : « Jovial et disert, bon vivant et non-conformiste, écrit Robert Buron, Le Basser s’était attiré d’innombrables sympathies individuelles. »
Mais les qualités de l’ancien chirurgien ne s’arrêtaient point là : « Il possédait aussi au plus haut point la qualité essentielle à tout homme politique : la vitalité.»
L’industrialisation de Laval
Sitôt élu maire après la mort de Goupil en 1956, Francis Le Basser souhaite développer l’industrialisation de sa ville. Pour lui, un remède s’impose : à défaut d’initiatives locales, il faut faire venir à Laval des capitaux et des patrons non mayennais.
Parmi les premières unités de fabrication à s’installer dans le chef-lieu de la Mayenne se trouve un établissement dont les bâtiments existent toujours : L.M.T. (Le Matériel Téléphonique). Suivront Gévelot et, entre autres, un grand atelier de confection.
Mais c’est entre 1960 et 1963 que les décentralisations atteignent leur apogée : Salmson, Thomson, L.M.T. (de nouveau), tandis qu’une convention est passée entre la Ville et Chausson, qui prévoit de réaliser à Laval, dès 1964, des fabrications parisiennes…
Le quartier Saint-Nicolas
En matière d’habitat, un nouveau quartier apparaît que Le Courrier de la Mayenne évoque – en citant les derniers construits - dans sa une du 10 avril 1965 : « Après les grands quartiers des Archives, du Pont-de-Paris, de Sainte-Catherine, de la Perdrière, du Pavement, de la Coconnière, de la Dacterie, d’Hilard et des Fourches, la cité Saint-Nicolas abritera 12 000 habitants. »
Dans le centre-ville, la construction la plus importante a lieu durant l’année 1968 : rendu nécessaire par l’accroissement de la population urbaine, le pont de l’Europe permet de relier la rue Crossardière à l’avenue du Vieux-Saint-Louis.
Le stade Le Basser
En 1969, Le Basser fait également construire la tribune d’honneur d’un stade de football qui, après sa mort (en 1974), portera son nom et connaîtra, de 1976 à 1989, les honneurs de la Première Division.
Œuvre de l’architecte Saint-Arroman, cette tribune est ainsi décrite par l’historien Dominique Eraud : « Réalisation exceptionnelle, cette toile de béton tendue entre deux treillis métalliques n’est solidaire de l’ouvrage inférieur que par quatre points d’appui situés à l’arrière. »
Bois de L’Huisserie
Bien qu’il n’ait point laissé le souvenir d’un nageur émérite, Francis Le Basser inaugura deux piscines municipales durant ses mandats : celle du Viaduc en 1958 (qui disparaîtra en 1992) et, en 1970, celle de Saint-Nicolas qui, en extérieur, posséde un bassin olympique de 50 mètres…
La Ville ayant, en 1955, acquis le Bois de L’Huisserie pour permettre aux Lavallois d’aller se promener en famille les dimanches après-midi dans un paradis vert de 226 hectares, Le Basser décide d’y installer des centres aérées qui réjouissent encore des jeunes pousses en 2011…
L’échec de Jean Raoux
En 1971, la liste de droite menée par le premier-adjoint Jean Raoux est battue par celle menée par un ancien ministre des IVe et Ve républiques, Robert Buron.
On disait ce fin politique « fini » mais ce Mitterrandien qui n'appréciait pas Mitterrand sut se faire élire en profitant habilement des tensions au sein de la majorité et d’un brillant passage à la télévision très remarqué quelques jours avant les élections…
Concernant les tensions en question, le témoignage d'une ancienne conseillère municipale de l'époque; Madame Pillon, le confirme : "Le soir de la défaite de Jean Raoux, en descendant l’escalier de la mairie, j'ai clairement entendu Le Basser dire à Buron la phrase suivante : « On les a bien eus à coup de pompes dans le cul ! »
( Et cette ancienne élue de conclure : "Le Basser a eu une fin de vie très misérable… Il habitait dans la maison au-dessus du CIO, place de la préfecture… Il était abandonné de tout le monde. Rachèle s’en occupait très peu car elle était toujours à Cassis à prendre soin de sa nièce… Elle n’en avait que pour cette dernière…")
Mais revenons au vainqueur de 1971...
Robert Buron
Bien avant d’être élu maire de Laval, le « signataire des accords d’Evian » avait, comme ministre, œuvré pour le développement de la ville natale d’Alfred Jarry, d’Ambroise Paré, d’Alain Gerbault et, entre autres, du Douanier Rousseau :
« En 1959, écrit le géographe Georges Macé dans sa thèse consacrée à l’industrialisation de la Mayenne, Buron réunit dans son bureau de ministre des Travaux Publics, le docteur Le Basser (…) et les dirigeants des usines Salmson d’Argenteuil qui songent à une décentralisation et prennent la décision de retenir en priorité la ville de Laval… »
« Buron des Burettes »
Décédé à Paris en 1973, Robert Buron n’eut pas le temps de lancer de grands travaux à Laval. Néanmoins, les citoyens de cette cité qui franchit le cap des 50 000 habitants dans les années 70, lui doivent la naissance d’un jumelage tiers-mondiste, avec une ville du Burkina-Faso, Garango…
Cet ancien démocrate-chrétien est également resté dans l’histoire mayennaise sous le nom de « Buron des burettes », ce qui permettait de le distinguer de son concurrent Pierre Buron, surnommé, lui, « Buron des Buvettes ».
A l’époque où tout le monde savait qu’une burette est le flacon destiné à contenir l’eau et le vin de la messe, cette distinction faisait sourire ; elle avait surtout un avantage : permettre aux électeurs âgés ou étourdis de ne pas se tromper de Buron…