Coup d'coeur du libraire n°19 : Churchill, Gomez Davila, Jean Bothorel, Houellebecq...
Cher JCG, je me réjouis de ce coup d'cœur n°19 qui met en avant des auteurs que j'affectionne particulièrement… Votre réaction ne me surprend pas, car je connais vos goûts, très proches des miens du reste. Je savais, par exemple, que le portrait de «Tonton Adolf» écrit par Churchill en 1935 dans Mes grands contemporains vous plairait, car ce n'est pas, comme on dit vulgairement, de la langue de bois… Et cela permet de mieux comprendre la fascination du peuple allemand de l'époque pour son Führer moustachu…
Ah, quel talent ce Winston ! Il n'avait pas que des qualités - et mérite le mépris éternel de ceux qui n'oublieront jamais le bombardement churchillien des marins français à Mers-el-Kébir - mais, question plume, c'est un seigneur… Je dois reconnaître que je lui voue, dans ce domaine, une immense admiration. Et tiens à féliciter le traducteur, qui a su se montrer à la hauteur… On se régale de A à Z, quel que soit le contemporain décrit par l'homme au cigare et au visage de bouledogue : Foch, Clemenceau, Trotsky, Kipling, Wells, Roosevelt, Hitler…
Merci également de m'avoir fait connaître l'un des auteurs réactionnaires les plus admirés de la planète, Nicolas Gomez Davila, un Colombien ayant signé deux classiques qui ne vieilliront jamais : Les Horreurs de la démocratie et Le réactionnaire authentique. De rien, cher Bois-Renard ! Un vieil ami de gauche me l'avait, si j'ose dire, présenté il y a plus de dix ans et j'ai savouré les deux pages qu'un des exemplaires de Rivarol lui a dernièrement consacrées.
En revanche, le petit livre décrivant les dangers de notre alimentation industrielle, Vous êtes fous d'avaler ça !, ne m'a guère emballé… Je le comprends car vous avez pu ainsi constater que vous ingurgitiez, tout comme bibi, des cochonneries à longueur d'année… Les escargots dits de Bourgogne, par exemple. Ou la moutarde dite de Dijon…
Franchement écoeurant ! J'ai préféré de loin le livre de souvenirs du Breton Jean Bothorel doté d'un titre qui n'exige pas d'explications particulières : Nous avons fait l'amour vous allez faire la guerre…. Ah, que voilà un pavé qu'on dévore de la première à la dernière page et dans lequel défilent des dizaines de personnalités du monde politico-journalistique que Jean Bothorel a interrogées pour différents journaux auxquels il a collaboré, entre 1981 et 2012.
Je me souviens de l'avoir lu dès sa sortie, quelques semaines avant que je ne devienne un employé de librairie il y a cinq ans, et d'avoir écrit dans la foulée un long article en citant toutes les personnes du livre que j'avais moi aussi rencontrées «en vrai». 106 exactement ! Hélas, cet article, que j'avais particulièrement soigné, a disparu suite à une fausse manœuvre informatique… Je n'avais pas eu le courage de le réécrire jugeant qu'il n'intéresserait sans doute pas grand monde...
Donnez-nous quelques noms, si ce n'est pas trop vous demander… Bien volontiers ! Ce sera l'occasion de ressusciter cet article disparu ! Et je vais tous vous les donner ! En commençant par les politiciens ayant occupé L'Elysée. Ainsi ai-je vu de mes yeux vu Mitterrand (à l'Ecole militaire, quand il venait prendre l'hélicoptère pour rejoindre un aéroport de la banlieue parisienne), Giscard (lors de meetings en mai 1981, et à Fréjus quelques années auparavant), Chirac (à Laval, Villacoublay, Paris…), Sarkozy (le jour où je suis allé déclarer ma première fille née, par hasard, à Neuilly), Hollande (à la Salle polyvalente lors des présidentielles qu'il a remportées)…
Je peux également écrire que j'ai vu Charles De Gaulle et Georges Pompidou, ensemble, à Laval, le 11 mai 1965... Mais je ne la ramène pas avec ce souvenir, j'avais deux ans et quelques mois...
J'ai également vu, en 2016, le «psychopathe poudré tantouzé» qui deviendrait président l'année suivante. Il était venu au Théâtre (jadis) municipal inaugurer un label dénommé «French Touch» et destiné à le faire connaître dans la France entière avant la grande élection. Je l'avais trouvé quelconque mais quelques fans l'avaient applaudi avant qu'il n'entrât au théâtre... Si je ne cite pas son nom dans cet entretien ce n'est pas parce que l'homme m'est insupportable à un point inimaginable mais parce que Bothorel ne le mentionne pas, ce qui ajoute une richesse à son ouvrage...
Parmi les politiciens ayant occupé Matignon, citons Pierre Messmer, Maurice Couve de Murville, Raymond Barre (vu à Saint-Berthevin, au Parc des Loges, lors d'un meeting qui s'acheva par une prestation de Thierry Le Luron), François Fillon (qui venait régulièrement en Mayenne pour inaugurer des chantiers payés par nos impôts, en tant que président du Conseil régional), Edouard Balladur (venu visiter la carrosserie Gruau lors des présidentielles de 1995), l'un des mondialistes les plus répugnants de sa génération, Jean-Pierre Raffarin, (vu à Lourdes ainsi que le jour où il était venu discourir lors de la remise de la Légion dite d'honneur de François d'Aubert.)
J'ai également vu, côté gauche, Pierre Mauroy, Laurent Fabius, Michel Rocard, Lionel Jospin...
Les autres politiciens cités par Bothorel que j'ai vus ont pour noms : Raymond Marcellin et Yvon Bourges (deux vieux Gaullistes rencontrés dans le cadre de l'édition d'une encyclopédie sur la Bretagne à laquelle je collaborais sur le plan commercial) ; Alain Madelin (personnage atypique croisé dans un aéroport), Charles Millon (venu à Laval en tant que ministre des Armées), Jacques Toubon, François Bayrou, René Monory (excellent orateur vu à l'Assemblée nationale), Pierre Méhaignerie (aussi «percutant» à Vitré qu'insipide et sans saveur sur la scène nationale) ; je pense aussi à un grand comédien méditerranéen, Charles Pasqua, à Alain Peyrefitte (qui était venu soutenir - et brillamment - François d'Aubert lors des fameuses législatives de 1978), Philippe Séguin (qui fut si médiocre devant Mitterrand lors du débat à La Sorbonne concernant le traité de Maastricht), Olivier Guichard (sorte de gros nounours croisé un midi dans une rue du VIIIe arrondissement de Paris, rue Washington dans mon souvenir)...
Je pense encore à Pascal Clément (venu inaugurer le nouveau Palais de justice de Laval), à Jean Tibéri, Jean-François Copé (que j'ai connu dans une «conf'» de Sciences-Po, toujours prêt - comme les scouts - à serrer des pinces comme s'il était en campagne électorale... L'archétype de l'ambitieux parisien...) Je pense aussi à ce pisse-froid de Barnier, à Hervé de Charette, Dominique Baudis...
Je pense aussi à Florian Philippot (qui m'a serré la louche au siège du FN la première fois où je m'y suis rendu), je pense à Philippe de Villiers (avec lequel j'avais déjeuné dans un restaurant de Laval), et, surtout, à ce cher Jean-Marie Le Pen (que j'ai applaudi plusieurs fois dans ses oeuvres de tribun et que nous avons reçu à La Librairie française en mars 2018 pour qu'il dédicace le premier volume de ses Mémoires, Fils de la Nation...)
Côté gauche, je pense à Bernard Kouchner (qui pilotait un scooter dans une rue du quartier latin), à Georges Kiejman, Jean-Christophe Cambadélis, à cette ordure de Michel Charasse (croisé au Sénat), à la très désagréable Claude Chirac (qui accompagnait son père lors de sa visite à Laval en 2000 et exerçait une très forte influence sur lui, le rendant du même coup totalement insignifiant)...
Parmi les journalistes… J'ai rencontré Philippe Alexandre dans un salon du livre, Thierry Ardisson, Denis Jeambar chez mes parents (quand, salarié du Point, il était passé à Laval au début des années 80 pour écrire je ne sais quel article et, j'ignore comment, nous l'avions reçu à la maison, dans le petit salon où trônait le grand bureau de feu mon père), Michelle Cotta (qui suivait la campagne de Balladur en 1993), Jean-Edern Hallier (à côté duquel je me suis trouvé assis à La Closerie des Lilas, un soir que j'y accompagnais une certaine Mme Girault…), BHL (que j'ai vu plusieurs fois au quartier latin, seul ou en compagnie de sa poupée Barbie), Alexandre Adler et Alain Duhamel (tous deux près du métro des Invalides) et, surtout, le truculent Jean Miot (qui était en passe de devenir un ami mais que la mort a fauché alors que nous devions écrire ensemble un ouvrage concernant un Sénégalais très connu mais dont j'ai oublié le nom - je suis vraiment un incorrigible franco-français !). Je pense aussi à Jean-Claude Casanova (qui enseignait à Sciences-Po et s'occupait, entre autres, de la revue Commentaires), à Bertand Cousin (adjoint de Robert Hersant et qui m'a fait passer un oral)...
Qu'il me soit également permis de citer cette tête à claques de Christophe Barbier (qui se promenait un soir dans le quartier de Montparnasse avec une jeune femme - sa fille ? - et, bien sûr, son écharpe rouge).
Je me souviens également d'avoir déjeuné avec Philippe Tesson, venu à Laval dédicacer un ouvrage qu'il avait écrit avec cette nullité de Laurent Joffrin sur la crise de l'autorité dans la société actuelle...
Même «tableau de chasse» pour certaines femmes citées dans l'ouvrage de Bothorel ? Oui. Outre Michelle Cotta et Arielle Dombasle déjà évoquées, je peux «aligner» la sublime Carole Bouquet (qui habitait près de l'Ecole militaire quand j'y effectuais mon service national en 1987-88), Roselyne Bachelot (vue à Laval et à Angers quand elle pérorait en tant que conseillère régionale avec sa voix insupportable de bourgeoise soixante-huitarde), Ségolène Royal (vue en meeting aux Ondines, à Changé ; de la classe mais quelle voix pénible !), à Catherine Nay (rencontrée à l'hôtel de Brienne) et, surtout, la très belle Gwendola du Coëdic - décédée bien avant d'avoir atteint le grand âge - avec laquelle j'ai quelques mois travaillé au siège du CNIP quand ce vieux parti de droite était présidé par Ivan Briant (lui aussi disparu après avoir vanté le traité de Maastricht sur lequel il crachait quelques minutes avant que Balladur ne lui proposât un poste de ministre s'il se reniait sur le sujet)…
Puisque nous sommes au rayon Femmes, je veux aussi mentionner Jany, Marine et Yann Le Pen, Anne Sinclair et l'une de ses idoles, Françoise Giroud, qui écrivait si bien et pensait si mal... Figurez-vous que j'ai lu quantité de ses ouvrages, surtout pour son style, en y prenant le plus souvent un vif intérêt... Une femme épatante, et académicienne, que j'ai entendue évoquer sa conversion, à Versailles, lors d'un congrès Ictus, Jacqueline de Romilly...
De nombreux grands patrons sont également cités, que vous avez connus… Disons que je les ai vus de près. Je pense au Baron Ernest-Antoine Seillière, invité par la CCI de Laval, à Vincent Bolloré, qui avait décoré de la Légion dite d'honneur l'un de mes cousins les plus entreprenants dans le domaine de la carrosserie industrielle ; je pense à Michel Pébereau, que j'eus comme professeur d'économie, à ce grand bavard de Michel-Edouard Leclerc, que j'ai interrogé longuement dans son bureau pour obtenir des informations concernant le fondateur des centres éponymes en Mayenne, André Jaud ; je pense également à son père Edouard, à Jean-René Fourtou, à André Rousselet, Serge Dassault, rencontré le jour de l'inauguration de l'école d'ingénieurs aéronautique de Laval (il avait bien fait rire l'assistance car il pensait avoir atterri avec son avion dans la Sarthe), à Robert Hersant, vu une fois à côté de l'avenue Victor Hugo, à Jimmy Goldsmith, avec lequel j'avais discuté lors d'un meeting qu'il avait tenu au Mans avec Philippe de Villiers lors de la campagne du referendum sur Maastricht en 1992. A l'époque, ce personnage m'avait beaucoup impressionné…
Poursuivons par les écrivains… J'ai vu, quelques mois avant qu'il ne nous quitte, Jean Raspail en dédicace à la Librairie française, Jean Dutourd sur les quais de Seine en train de feuilleter un ouvrage qui devait être rare ainsi qu'au dernier meeting de Giscard en mai 1981, Louis Pauwels au Salon du livre organisé par Le Figaro à l'Opéra Garnier ou au Grand Palais (je ne me souviens plus du lieu mais Pauwels portait une cape et avait fière allure) ; j'ai écouté le très tonique Maurice Druon dans l'enceinte de l'UNESCO lors d'un colloque organisé pour le centenaire de la naissance de Charles de Gaulle en 1990 (il ressemblait à Sacha Guitry : chapeau, cape, canne avec pommeau, intonations) ; Jean-Marie Rouart, salué Renaud Camus, lors d'une manifestation en 2013 («Jour de colère»), discuté avec le professeur René Rémond chez Siloë, vu Pierre Péan enfourcher sa mot, Alain Minc (que je range dans la catégorie des écrivains parce qu'il a signé quelques livres), insupportable petite frappe haïssable et croisée dans une rue du VIIIe arrondissement ; Bruno Seznec (venu défendre en Mayenne son grand-père préféré) ; l'académicien Marc Lambron, le sympathique Denis Tillinac (qui m'avait accordé un entretien d'embauche quand il dirigeait La Table ronde) ; François Nourissier (rencontré lors du premier Salon du Livre de Paris qui se déroulait au Grand Palais) ; Jean d'Ormesson (qui dédicaçait avec force sourire ses livres à la Fnac des Ternes) ; Gonzague Saint-Bris, Henri Queffelec («écrivain de la mer» côtoyé lors d'un salon du livre à Cholet), Pierre Chaunu (que j'eus comme prof à La Sorbonne) ; Régis Debray (qui rentrait chez lui dans une rue proche de l'Odéon)...
Terminons par l'éditeur Jean Picollec (rencontré en compagnie de Philippe Randa), Pierre Assouline, dans un restaurant,et l'animateur de la célèbre émission Apostrophes, Bernard Pivot, croisé dans le XVIIe arrondissement de Paris où il résidait...
Pour finir, qu'il me soit possible de mentionner le conseiller d'Etat Bernard Tricot, qui me reçut sur son lieu de travail pour tailler une bavette, l'amuseur Coluche (vu au Théâtre du Gymnase), l'excellent Jean Yanne (dans une grande enseigne parisienne, au rayon jouets où il cherchait un cadeau de dernière minute), le très populaire «adjudant-chef» Michel Galabru, e musicien breton Alan Stivell (au festival Interceltique de Lorient), Roman Polanski (dinant avec sa très jeune femme dans un restaurant du XVIe arrondissement), à Jean-Michel Ribes, Daniel Auteuil...
Mais, dites-moi, vous nous racontez votre vie, cher JCG ! Disons que je profite du livre de Bothorel pour citer quelques célébrités qui... ne diront pas grand chose à nombre de nos auditeurs... A propos de ces célébrités, qu'il me soit permis d'ajouter que je ne les «fréquenterais» plus aujourd'hui, non parce que certaines, beaucoup, sont mortes, mais parce que mes idées actuelles, ma façon de voir les choses, ma connaissance de certains milieux et lobbies, etc. ne sont plus du tout celles que j'avais dans le temps...
En clair, j'aurais à redire sur la plupart des «vedettes» précitées. Mais ceci est un autre sujet...
Oui ! Car maintenant, la seule chose à faire, la plus importante, pour nos lecteurs intéressés par cet entretien qui s'achève par des extraits du dernier roman de Michel Houellebecq, Anéantir... c'est de cliquer sur ce lien :
https://santavox.com/wp-content/uploads/2022/04/thierry19.mp3
Merci cher Bois-Renard, et bonne fin de journée à tous ceux qui nous font l'honneur de nous suivre...