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Didier Brunet, un grand goustier très apprécié

Didier Brunet nous a quittés début août, à 63 ans, après avoir longtemps lutté contre le cancer. Sa disparition attriste tous ceux qui ont eu la chance, le bonheur de connaître cet ancien boucher-charcutier aussi sympathique que "droit dans ses bottes" (comme disait l'autre). Un type bien.

 J'aurais pu, j'aurais dû...

La dernière fois que je l’ai revu, c’était début mai. Un midi, rue du Val-de-Mayenne. Je déjeunais avec un cadre espagnol de chez Lactalis au Petit Sévigné. Didier est passé devant le restaurant en direction du Vieux-Château et je dégustais – devinez quoi ? -  un met qu’il goûtait et préparait divinement, des rognons.

Nous nous saluâmes d’un sourire et je fus saisi par sa maigreur. J’ai hésité à quitter mes rognons et l’Espagnol qui louchait dessus (il en commanderait du reste le lendemain) mais je me dis que je reverrais bien Didier un de ces jours… Tu parles, Charles ! On devrait toujours aller discuter avec les gens qu’on apprécie car il arrive que ce soit la dernière fois qu’on les voit en chair et (dans le cas présent) en os.

Treize ans de conseil municipal

Didier, je l’ai connu et apprécié grâce au journal municipal car il fut pendant treize années l’un de nos élus. Ayant souhaité un temps être charcutier-traiteur dans ma jeunesse, c’était toujours un plaisir pour moi de parler bonne chère avec lui. Politique aussi, car cet homme sympathique aimait profondément la France et ne savait que trop, ayant vécu à Dreux, vers quelle pente se dirige notre pays…

Pour Laval Infos donc, j’ai eu l’occasion de le rencontrer longuement trois ou quatre fois et d’écrire plusieurs articles concernant sa vie, laquelle mérite grandement de trouver place sur ce site du souvenir. Ainsi, son sourire ne nous quittera plus...

Marie-Thé, sa moitié

Ancien boucher-charcutier installé naguère dans la rue du Pont de Mayenne, Didier avait appris son métier dans son département natal, l’Orne. Il l’avait appris par une voie qui lui était particulièrement chère et que les nombreux jeunes présents à sa messe d’enterrement ont permis de mettre en avant : l’apprentissage.

En âge de servir sous les drapeaux, Didier devient "aviateur" à Paris, à la caserne Balard mais il ne s'envoie pas en l'air : il exerce les fonctions de responsable boucherie. Pourquoi évoquer cet épisode ? Parce que lors d’une perm’, « dans un bal du côté de Nogent », il rencontre « Marie-Thé », qui deviendra sa moitié en 1970.

Didier libéré des obligations militaires, le lieu d’affectation professionnelle entraîne un compromis entre les jeunes mariés : « Ma femme, à l’époque auxiliaire-puéricultrice, ne voulait pas de Paris, m’avait-il avoué, et je ne voulais pas de Nogent ! Nous partîmes pour Dreux. » Ou Didier, gérant de deux magasins appartenant aux Comptoirs Modernes, deviendra papa de deux garçons et de deux filles (le choix du roi).

Admirateur du Grand Charles, il milite également au RPR du Grand Jacques, aux côtés du sénateur-maire Jean Cauchon (ça ne s’invente pas !).

Un engagement courageux

En 1985 jugeant l’ambiance à Dreux insupportable, les Brunet reviennent dans l’Ouest. Chez nous, à Laval, où ils ont de la famille. Et… où une charcuterie est à reprendre rue du Val de Mayenne. Une fois installé à son compte (avec Marie-Thé, qui a abandonné la puériculture pour le cochon), Didier n’en continue pas moins à militer sous la bannière du RPR. Un choix logique et courageux. Logique quand on pense comme lui que toutes les catégories socio-professionnelles doivent participer au débat politique, y compris les commerçants. Courageux quand on sait qu’afficher ses préférences politiques n’est pas le trait premier des professions indépendantes…

En 1995, le RPR lui propose d’être sur la liste menée par François d’Aubert, qui en fera son conseiller municipal délégué à l’Apprentissage. Il est aussi président du foirail (une responsabilité que ce fils de marchand de bestiaux prendra toujours très au sérieux) et participe à plusieurs commissions (Vie de quartier, Enfance Jeunesse…) En 2001, il devient  administrateur délégué duCentre de Formation d’Apprentis des Trois Villes

Intarissable sur le sujet de l’apprentissage, Didier ne se réjouissait pas seulement d’avoir formé près d’une vingtaine de jeunes par ce biais depuis son installation à Laval. Il se réjouissait aussi de voir de plus en plus de bacheliers faire le choix de cette formation peu prisée par les « intellectuels ».

Les Tripaphages 

Défenseur du label Bœuf Fermier du Maine, ce fin gourmet était également le grand goustier attitré d’une confrérie unique au monde : celle des Tripaphages. Créée en 1996, icelle réunit une bonne trentaine de joyeux drilles qui se sont fixé une mission essentielle quand on est fortement attaché aux traditions culinaires du pays de Vatel et de Brillat-Savarin, de Paul Bocuse et de Guy Lemercier : remettre à l’honneur tous les morceaux du cinquième quartier, en deux mots, les abats.

En 2006, lors du salon de l’agriculture (tristounet, souvenez-vous : les volailles étaient restées en province), il avait reçu des mains de François d’Aubert la médaille de chevalier du Mérite Agricole. Le roi n’était pas son cousin, ce jour-là.

Bien sûr, cette récompense lui valut - et pour la dernière fois -  un article dans Laval Infos.

 

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