Le Lavallois vu par l'un des docteurs Bucquet

boston.le.basser De 1798 à 1918, quatre générations de Bucquet ont oeuvré pendant 120 ans auprès des Lavallois, que l'aîné de la série a aussi soignés avec sa plume acerbe...

 

Le jardin de la Perrine

A Laval le nom de Bucquet est célèbre car il évoque une charmante petite place qui, au sommet de l’escalier des Eperons, offre une entrée sur le jardin de La Perrine et, surtout, un superbe panorama sur le Vieux-Château et les quais de la ville. Mais ce patronyme est aussi passé à la postérité pour la description – peu amène - du Lavallois type du XIXe effectuée par le premier Bucquet à s’être installé dans le chef-lieu de la Mayenne, en 1798…

Denis et Anatole Bucquet

C’est à cette date en effet que, chirurgien dans l’Armée de l’Ouest depuis deux ans, le Parisien Jean-Baptiste-Denis Bucquet (1771-1841) découvre Laval, à la suite d’un changement de garnison. La ville l’enchante, il décide de s’y installer. En 1803, il occupe le poste de médecin titulaire à l’hôpital.

En 1841, l’année où ce correspondant de l’Académie royale de médecine passe l’arme à gauche, son 7e  et dernier rejeton, Jean-Baptiste Anatole (1814-1872), devient chirurgien en chef de ce même hôpital.

Très actif, Anatole fonde la Société de secours mutuel des médecins de la Mayenne, fait cinq petits Bucquet à Madame, poursuit la rédaction des Ephémérides médicales de Laval et, malgré son âge avancé (56 ans), participe à la guerre de 1870 avant de s’éteindre le 1er janvier 1872.

Jean-Baptiste Henri Bucquet

Son fils aîné, J.-B. Henri (1857-1928), reprendra le bistouri familial, sera huit fois papa, introduira les méthodes de Pasteur en matière d’asepsie à l’hôpital et participera, avec le pharmacien et bactériologiste Prosper Brou, à la mise en place du premier service de radiographie.

Entre autres actions, il organise en 1914 le service de trains de blessés militaires et l’assistance médicale gratuite. Mais il ne verra pas son 3e fiston reprendre le flambeau à Laval car J.-B. Joseph, médecin aide-major en 1915, tombera au champ d’honneur le 10 octobre 1918 interrompant ainsi, à 29 ans, la saga médicale des Bucquet de Laval…

Le Lavallois du XIXème

Ces informations médicales fournies, passons à la description du Lavallois type que Bucquet l’ancien a commencée en 1808 dans Topographie médicale de la ville de Laval et de son territoire, qui ne sera publié qu’en 1894 (c’était préférable pour sa clientèle lettrée…)

« Le Lavallois est d’une taille moyenne, sa physionomie est tranquille et presqu’insignifiante ; son visage, un peu pâle, est rarement animé de la fraîcheur et du coloris de la jeunesse ; il a l’œil terne, les cheveux plats ; mats et sans couleur ; ses articulations sont grossières et ses membres mal conformés ; l’appareil musculaire est peu prononcé : on ne voit que très rarement de ces hommes musclés. Il a un corps lourd, mal assis sur ses hanches, un ventre déprimé, une poitrine étroite, des pieds larges et mal placés. »

Pénates, famille, coutumes

Dans Caractères, mœurs et usages, Jean-Baptiste Denis indique que « le Lavallois est trop près de la nature. Les sciences, les arts et les lettres ne lui sont connus que de nom ; nul peuple n’est plus attaché à ses pénates et à ses coutumes ; hors de sa famille et de ses habitudes, il n’y a rien pour lui. »

Et de poursuivre : « Un Lavallois ne fera jamais ce que ne fait pas un autre et n’osera rien entreprendre sans s’être assuré un bon nombre d’imitateurs. Il craint toujours pour les suites, les conséquences si quelqu’un s’écarte de la ligne tracée. »

Les Lavalloises

« Le Lavallois a un caractère indolent qui touche la mélancolie, poursuit Bucquet ; ses sensations sont peu vives et encore moins profondes ; ses idées sont peu nombreuses et peu rapides ; il articule mal et traîne les mots. Il a un jugement sain mais point d’esprit ni d’imagination. »

Les Lavalloises ? Pas terrible ! « Elles n’apportent pas dans le commerce de la vie, ce liant, cette amabilité qui nous appelle auprès d’elles et leur inspire le désir de plaire. Ainsi négligent-elles beaucoup trop, même au mépris de leur santé, le soin de ces charmes auxquels partout ailleurs elles attachent un si grand prix mais qui manque ici de but et d’objets. »

Le docteur Le Basser

Enfin, « si le Lavallois n’est pas parfait, poursuit Bucquet, force est de reconnaître qu’il a au moins la qualité de n’être pas rancunier… »

Une preuve ? Il a accepté de donner le nom de Bucquet à la place où la famille s’installa en 1851 ! Ce cadeau posthume leur fut accordé en 1959 avec, comme maire de la Ville… un ancien chirurgien, bien sûr : le docteur Le Basser !