Michel Jouneaux, historien local

JouneauxDisparu le 19 janvier 2012 à l’âge de 80 ans, l’ancien journaliste Michel Jouneaux avait eu les honneurs de Laval Infos en février 1999 lors de la sortie de son troisième ouvrage, celui consacré à une institution scolaire qui affichait alors 134 ans, l’Immaculée Conception.

Lors de notre rencontre à la mairie, je me souviens qu’il m’avait dit être le deuxième fils d’une famille de 16 enfants – oui, seize, vous avez bien lu ! J’avais alors évoqué la difficulté d'organiser un repas de famille chez les Jouneaux et il m’avait précisé qu’un déjeuner avec les pièces rapportées  exigeait – en 1999 – 110 couverts !

 

Cette curiosité évoquée, nous passâmes au sujet de son livre : l’histoire, fort riche en anecdotes,  de l’établissement où il avait usé ses fonds de culotte entre 1942 et 1945, l’Immaculée Conception. J’étais d’autant plus intéressé par cet ouvrage que j’avais, moi aussi, fréquenté ce « bahut » trois saisons : entre 1978 et 1981, année où 99,9% des profs prirent leur pied un certain 10 mai…

Avant d’entrer dans le vif du sujet, Michel Jouneaux m’expliqua qu’il avait été scolarisé à l’Immac parce que son père Henri, démocrate chrétien exemplaire et journaliste à Ouest Eclair, avait accepté de quitter son cher Morbihan pour venir travailler à Laval pendant l’Occupation. De retour à Vannes, le 1er janvier 1945, le jeune Michel fréquentera les jésuites avant d’entrer, comme employé, à la MSA où il restera seize années et introduira « un syndicalisme de dialogue qui n’existait pas jusque là ». Il était particulièrement fier de ce travail-là.

Devenu correspondant sportif pour Ouest France, il sera envoyé à Laval en 1970 où il couvrira, pour ce quotidien, l’actualité sportive pendant 21 ans. Ce qui explique pourquoi, en 1994, jeune retraité, Michel Jouneaux publiera un livre sur Le Stade Lavallois, une histoire qui connaîtra un succès mérité. Deux ans auparavant, il avait écrit Les patronages également publié chez Siloë. Si mes souvenirs sont exacts, il a dû également écrire l’histoire d’un patro qui lui tenait à cœur (et où nombre de ses enfants s’illustreront avec talent sur les terrains de foot), Les Francs-Archers de La Bonne-Lorraine.

Je me souviens très bien de notre entretien de 1999 où nous avions longuement évoqué la place des catholiques dans la société française de l’entre-deux-guerres et de la Libération. Adepte de la démocratie chrétienne, Michel Jouneaux penchait du côté du Sillon et de son leader charismatique Marc Sangnier et n’aimait guère les cathos de droite proches de l’Action française. Notre discussion fut passionnante car l’homme savait se montrer respectueux à l'égard des gens qui ne pensaient pas comme lui, ce qui n'est pas donné à tout le monde...

C’était un homme cultivé et qui ne manquait pas d’esprit. Un homme à l’ancienne, qui considérait la lecture comme une activité essentielle… Je me souviens que durant l’entretien, évoquant les directeurs successifs de l’Immaculée, il avait fortement vanté le père Caplet (alias Capote, que je connaissais) et quelque peu dénigré le père Hamelin (un tribun contre-révolutionnaire qui attirait les foules lors des messes du dimanche).

Quelques semaines après, il fut un tantinet déçu par mon article de deux pages qui consacrait trois paragraphes louangeurs au second et un seul au premier… En revanche, il avait beaucoup apprécié les lignes suivantes qui achevaient son portrait : « Dans ce troisième livre, et notamment aux chapitres VIII et XIII, M. Jouneaux a mis tellement de sa propre histoire que, tout dernièrement, alors qu’elle lisait l’œuvre de beau-papa avant de s’endormir, sa seconde bru, Mado pour les intimes, a tapoté l’épaule de son Mitou de mari pour lui murmurer tendrement : « Mais dis donc, on retrouve la vie de ton père dans son bouquin ! »

Avis aux amateurs, ce bouquin passionnant se vend toujours chez Siloë ! Enfin, chez Chapitre !