JC Gruau porte plainte pour diffamation contre MM. Zocchetto et Boyer

Cher JCG où en est votre "Affaire Césaire", qui fit couler tant d'encre dans les journaux locaux le mois dernier ? Eh bien, j'attends toujours des nouvelles du côté de la Justice ou du commissariat de police (j'attends sans attendre, vous m'avez compris) puisque, comme vous le savez, le maire a considéré comme nécessaire de transmettre cette affaire au Procureur de la République. Ce qui, comme je l'avais laissé entendre lors du dernier conseil municipal, a entraîné de ma part une plainte pour diffamation à l'encontre de MM. Zocchetto et Boyer qui ont osé qualifier mes propos de "racistes". Cette plainte, qui s'appuie sur l'article 31 de la Loi du 31 juillet 1881,est partie hier, mardi 6 juin, via une lettre recommandée avec A.R...

Je pense que vous avez entièrement raison car, comme vous le faisiez remarquer dans notre dernier entretien, cette accusation n'est pas anodine. Et comment ! Car si certains me regardent désormais d'un drôle d'air beaucoup de gens m'ont parlé de cette affaire ! Dieu merci la plupart de ceux qui en ont pris connaissance me soutiennent à 100%. Ils sont, comme moi, sidérés de constater qu'on peut se faire traiter de "raciste" simplement en rappelant "la couleur de peau" de telle ou telle personne ! Car je vous rappelle que j'ai signalé que l'un des chantres de la négritude, Aimé Césaire, était noir !

Marre de ces politiciens qui, pour noyer le poisson, utilisent la "frayeur" que suscitent certains mots aujourd'hui et la psychose antiraciste dans laquelle nous vivons. A qui le dites-vous ! D'autant qu'il y a fort à parier que je fréquente dans ma vie de tous les jours plus de personnes ayant la peau noire que n'en fréquentent ceux qui m'ont accusé de "raciste" avec une arrière pensée qui se voit comme un nez au milieu de la figure : celle de me voir quitter le conseil municipal...

Moi ce que j'espère c'est que nous quittions cette affaire le plus vite possible, c'est pourquoi je me permets de vous demander de me lire le texte de ce courrier pour que je le publie. Bien volontiers ! Le voici (qui intéressera peut-être quelques journalistes...) :

 Monsieur le Procureur,

Le lundi 15 juin 2017, lors du conseil municipal de la ville de Laval, le conseiller Jean-Christophe Boyer a qualifié de "racistes" certains de mes propos et demandé au maire de Laval François Zocchetto de porter cette plainte en justice, ce qu'il a fait quelques jours après.

Considérant cette accusation de « raciste » comme diffamatoire (je n'ai jamais tenu de tel propos) , c’est-à-dire attentatoire à ma considération et mon honneur (je ne suis pas raciste) et portant préjudice à ma recherche d'emploi (je suis chômeur en fin de droits depuis 2011), je me permets de déposer plainte contre MM. Boyer et Zocchetto pour diffamation.

Pour votre complète information, permettez-moi, Monsieur le Procureur, de rappeler brièvement les faits.

Positionné à la droite de l'échiquier politique du conseil municipal de Laval, j'ai été élu sur une liste en mars 2014 qui dénonçait, entre autres, une forte croissance de la population d’origine africaine dans notre cité. Personne n'est obligé de partager ce type de discours mais personne ne peut nier que je l'ai soutenu depuis mon entrée en politique et que, depuis trois ans que je siège au conseil, il ne m'est jamais arrivé de l'oublier quand une délibération particulière me donnait l'occasion de l'évoquer.

Ainsi, le 15 mai dernier, lors de la délibération concernant le programme estival de la bibliothèque municipale, estimant que ce dernier accordait une trop grande place à la culture africaine, j'ai évoqué - pour les critiquer -  plusieurs manifestations dont l'une, proposée par la compagnie T'Atrium, nous "propose une mise en musique et en son des grands discours  des figures africaines et afro-américaines du XXe XXIe siècles" comme, par exemple, Nelson Mandela, Spike Lee, Aimé Césaire...

Ayant le souci d'offrir au débat public des interventions qui privilégient l'esprit français, j'ai tenu à achever mon intervention par une tirade qui paraphrasant une célèbre citation de Jean Yanne : " Je pense que l'Afrique est un grand continent, qu'Aimé Césaire est un grand poète, que Spike Lee est un grand cinéaste et je pense aussi que je peux vivre sans l'Afrique, sans Aimé Césaire et sans Spike Lee."

C'est alors qu'à ma grande surprise, Monsieur Zocchetto, n'ayant vraisemblablement pas pris connaissance du programme incriminé par mes soins, m'a répondu du tac au tac : "Juste que Monsieur Aimé Césaire est Français.

J’ai alors répondu mécaniquement : "C'est quand même un noir, je m'excuse de le dire". Sous-entendu, non seulement il appartient à l'une des grandes figures africaines du programme précité mais, de surcroît, il est l'un des chantres de la négritude...

Ma remarque a suscité un tollé auprès des conseillers municipaux sans que j'en comprenne le pourquoi, qui me sera révélé le lendemain par un journaliste de Ouest-France (qui souhaitait m'interroger sur ce sujet) : mes "chers collègues" ont cru qu'en disant que Césaire était noir je lui retirais la "possibilité" d'être Français alors que ce n'était aucunement ce que je voulais dire. Aucunement.

Puis le conseil, après ce brouhaha, a repris son cours normal et j'ai demandé et obtenu la parole quatre délibérations après, pour approuver une décision municipale, à savoir l'achat d'une aquarelle de François Ricard représentant une vue de Laval de 1850...

Vingt minutes se passent quand, soudain, Jean-Christophe Boyer demande la parole à François Zocchetto pour évoquer la délibération concernant la "désaffectation et le déclassement des îlots A1 et A3 du quartier Ferrié".

Que dit-il sur ce sujet technique ? Ceci : "Je voudrais revenir un instant sur l'incident de tout à l'heure. Je voudrais vous dire que nous sommes très choqués par les propos qui ont été tenus par un élu municipal et que nous soutiendrons toute plainte portée par la Ville pour les propos racistes tenus dans cette enceinte."

Si cette remarque m'a sidéré (pour moi la remarque liée à l'appartenance de Césaire au continent africain appartenait au passé), le comportement de l'actuel maire de Laval m'a choqué également car, habituellement, il est impossible de "revenir" sur un sujet passé, traité. Le nombre de délibérations étant toujours très important lors des conseils (une quarantaine, en l'occurrence le 15 mai), le maire nous a habitués à une rigueur dans ce domaine, rigueur que je respecte. Mais là, Monsieur Boyer n'a droit à aucune remontrance et s'exprime à sa guise sur mon prétendu racisme ! Sans que le maire ne tienne le discours que j'attendais : "Monsieur Boyer, ce n'est pas le sujet de cette délibération, merci de parler du sujet qui nous intéresse..." Je considère donc que Monsieur Zocchetto est complice de cette diffamation.

Atteint dans mon honneur, je demande la parole, que je n'obtiens pas... D'où le fait que je suis contraint de m'exprimer sans micro, ce qui est difficile car je suis placé très loin du maire, tout au bout...  Je ne peux pas être diffamé gratuitement alors que j'ai simplement signalé que Césaire était tout-à-fait à sa place dans une manifestation culturelle consacrée aux grands discours africains...  

C’est pourquoi, j’entends porter plainte pour diffamation à l’encontre de Messieurs Boyer et Zocchetto pour avoir qualifié mes propos tenus en conseil municipal de « racistes », et ce en vertu de l’article 31 de loi du 29 juillet 1881.

Je vous prie de croire, Monsieur le Procureur, à l’assurance de mes respectueux sentiments.

Merci JCG, et maintenant évoquons le dernier livre que vous avez lu, un livre de l'ancien journaliste Jean Bothorel, un livre de 578 pages que vous avez savouré de la première à la dernière ligne et qui porte un titre fort bien choisi quand on connaît la situation dans laquelle nous nous trouvons et... ce qui nous attend : "Nous avons fait l'amour, vous allez faire la guerre". Exact ! Mais justement, comme j'ai beaucoup de citations et d'anecdotes à donner, je préfère que nous en parlions dans un autre entretien. En fin de semaine, par exemple.

Demande accordée. A vendredi, cher JCG ! A vendredi, l'ami.