L'Empire du Bien à fond contre la Bible

saint-vnrand

La "société post-historique" décrite par Philippe Muray ne peut que se heurter à l'Ecriture, qui est pour elle la "Contradiction des contradictions" ! 

 La Bible à l’index !

Dans la « société post-historique » décrite pour la première fois dans L’Empire du Bien (1991), Philippe Muray écrit que l’individu ne doit « prétendre avoir une seule mauvaise pensée à soi, ni même une seule pensée. » Et d’ajouter :  « Cette menace doit être conjurée par l’arrachage des racines bibliques de toute pensée. »  Eh oui, qui l’eût cru ! Dans la « nouvelle société » qui s’est mise en place dans les années 90,  la Bible est à mettre… à l’index !

Avocats bavarois

Dans Exorcismes spirituels III, chapitre Parc d’Abstractions, Philippe Muray signale un fait étonnant : en 2000, « mandatés par des parents d’enfants mineurs », deux avocats de Bavière ont demandé à ce que la Bible soit inscrite sur la liste des écrits dangereux pour la jeunesse !

Raisons de leur courroux : l’Ecriture prêche – selon leurs propres termes -  « le génocide, le racisme, l’antisémitisme, la mise à mort cruelle des personnes adultères et des homosexuels, l’infanticide et nombre d’autres perversités ».

Adam et Eve

Philippe Muray voit dans cette attaque «un symptôme de ce que la lutte finale est engagée pour effacer jusqu’aux dernières traces de l’histoire judéo-chrétienne - , autrement dit l’Histoire tout court, qui se ramène aux longues suites de l’exil du Jardin d’Eden…»

Cet exil d’après la « Chute » biblique  – Adam et Eve – rendait impossible l’état d’indifférenciation qui caractérisait le paradis terrestre et que notre époque souhaite à tout prix retrouver…

Sérieux problèmes

Avec un tel dessein, il va de soi que la Bible pose problème. De sérieux problèmes, même ! De fait, et Muray le rappelle avec humour, elle ne prône nulle part :

La Tour de Babel

On n’y trouve non plus «aucune contribution à l’accroissement des droits des malades, du droit au logement et de ceux des handicapés, des sans-fenêtres, des sans-portes et des sans-papiers ! »

Et que dire de l’épisode de Babel ? Sinon qu’il est « une insulte à notre idéal de culture interculturelle et transfrontalière » ! « Il est possible d’écrire nettement que la Bible n’a cessé de lutter contre cette tyrannie du Même dans laquelle nous entrons, et que la longue période où cette tyrannie fut tenue en respect porte le nom de civilisation. »

La Genèse

Autre problème : la Genèse marque à jamais «la différence des sexes comme condition de possibilité de toute humanité» : « multiplication des peines de grossesse » pour Madame ; « souffrance du travail quotidien » pour Monsieur et « retour à la terre par la mort » pour tout le monde !

Il n’est nul besoin d’être « croyant », poursuit Muray, pour discerner dans les proscriptions apparemment bizarres du Lévitique, qu’elles soient alimentaires ou autres, l’horreur de toute indifférenciation et, par la bouche de « l’Eternel », la volonté d’en proscrire la réapparition.

Exemple (parmi cent autres) : «Tu ne coucheras point avec un homme comme on couche avec une femme.»

Les jeux-vidéos

Quant aux guerres et massacres dont parle la Bible « ils ont le malheur d’avoir été réels, de ne pas s’être rapprochés de l’idéal « zéro mort » des guerres parfaites d’aujourd’hui. D’où l’imprudence, en effet, de les livrer à la méditation de jeunes enfants qui ne mènent la guerre que dans la quatrième dimension de leur jeux vidéo (…) et où, bien sûr la mort n’est jamais définitive » (sauf quand l’un d’eux se prenant pour un héros virtuel décapite un membre de sa famille et a droit à la première page du journal Détectives !)

Occultisme et paternalisme

Muray parle aussi de l’hostilité de la Bible vis-à-vis de ce qui relève de l’occultisme (et que ne saurait supporter « nos esprits modernes où cohabitent si harmonieusement les inepties des cartomanciennes et les prestiges de la technique la plus ravageante »).

Et que dire du « paternalisme abusif dont le Livre regorge, ni de sa prétention paranoïaque à un châtiment descendu du ciel. »

Bref, dans ces domaines comme dans vingt autres, la Bible n’a cessé de « se rendre antipathique, conclut Muray. Elle n’est pas du tout glamrock. Elle ne cultive pas le maximum respect. »