Novembre 1956 : Le Basser succède à Goupil

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La tranche de vie évoquée dans cet article permet de retrouver deux hommes qui furent maires de Laval entre 1946 et 1971, Albert Goupil et Francis Le Basser.

Elle débute en octobre 1956 par un discours du premier vantant les mérites du second.

Et s’achève un mois plus tard par de belles paroles du second retraçant les qualités du premier… mort quelques jours plus tôt !

 

 

Le Président Coty

Vendredi 5 octobre 1956, pot de départ à l’hôpital Saint-Julien.

Atteint par la limite d’âge (67 ans), le docteur Le Basser, chirurgien de l’hôpital de Laval, rend son bistouri après 35 ans de bons et loyaux services qui rendirent la santé à beaucoup de Mayennais.

Le pot réunit une soixantaine de médecins dont les noms ne sont plus désormais dans les mémoires que des vieux Lavallois : Mer, Aubin, Bézier, Le Chertier, Durieux, Deslandes, Marlin, Lebret, Lecoq…

Sans oublier Coty,  le remplaçant du docteur Le Basser quai Paul-Boudet et le neveu du président de la République en exercice qui s’était déplacé spécialement pour son mariage à Laval…

Le chirurgien

Maire de Laval et président de la commission administratives des hospices, Albert Goupil, 78 ans, se lance dans un grand discours, sa spécialité.

Se reportant 35 ans en arrière, le premier magistrat de la ville évoque l’arrivée du jeune chirurgien rennais qui « bouscula les traditions, fut rapidement adopté par la population et devint une figure très populaire ».

Il parle aussi du Résistant, arrêté le 3 mai 1944 puis déporté en Allemagne d’où il reviendra un an plus tard, libéré par les Alliés.

Jacques Soustelle

Enfin, il vante le parcours de l’homme politique, qui préside le conseil général depuis 11 ans (ça durera jusqu’en 1973), qui siège au Sénat depuis 1948 (il le quittera en 1965) et qui fut aussi, du 18 mai 1945 au 15 juin 1946, maire de Laval (poste qu’il abandonnera sur un coup de sang parce que les électeurs lavallois avaient refusé d’élire député son ami Jacques Soustelle lors des élections législatives de 1946 !)

Moins d’un mois plus tard, le matin du 1er novembre, sur le coup de 4 heures, intrigué d’apercevoir de la lumière dans le bureau où l’imprimeur Albert Goupil aimait à travailler après dîner jusque tard dans la nuit, un voisin donne l’alerte...

Frappé de congestion

Quelques minutes après, le corps du maire est découvert inanimé sur le sol dudit bureau, à deux pas de la maison familiale sise au bas de la Grande-Rue. Frappé de congestion dans la nuit du 31 octobre, le premier magistrat de la ville décèdera le 2 novembre sans avoir repris totalement ses sens.

Répandue à la vitesse d’un cheval au galop, la nouvelle de sa mort plonge la ville dans la tristesse. Le 6 novembre, les funérailles seront suivies par des milliers de Lavallois désireux de rendre un dernier hommage à un concitoyen qui avait permis à sa ville d’effacer les traces de la guerre 39-45…

Pierre Elain

L’élection de son remplaçant a lieu le 16 novembre, sous la présidence du doyen Le Pecq et en présence d’un « p’tit nouveau », Forveille. La séance ouverte, Le Basser demande au 1er adjoint Pierre Elain s’il compte se présenter. Ce dernier ne le souhaitant point, l’ancien chirurgien pose alors sa candidature en arguant de ses responsabilités (Sénat, Conseil général…) : « Elles me permettront d’œuvrer mieux que quiconque dans les intérêts de la ville. »

Un autre conseiller se présente, lui aussi ancien déporté : l’adjoint au maire Jean Hunaut ; neuf années de collaboration étroite avec Albert Goupil, qui lui « témoignait sa plus grande confiance », l’incitent à « poursuivre l’œuvre entreprise ». Enfin, au nom du groupe des élus communistes, M. Gargam pose la candidature de M. Dufresnoy.

Jean Hunaut battu !

Un premier tour accorde 12 voix à Le Basser, 11 à Hunaut et 4 à Dufresnoy, qui retire sa candidature. Une suspension de séance est alors demandée, mais certains conseillers dont Francis Le Basser la déclarent impossible : « Etant donné qu’il n’y a plus que deux candidats, elle serait illégale ! »

Les 27 conseillers votent de nouveau et Le Basser, ayant cette fois obtenu la majorité absolue (14 voix contre 12 à Hunaut) redevient maire de Laval. Une nouvelle ère commence : celle de l’industrialisation de la ville pendant les Trente Glorieuses, qui s’achèvera avec la défaite de la droite en 1971 contre Robert Buron…