Un banquet républicain avec Félix Faure

mairie.tricolore

En France, sous Marianne III, toute visite officielle d’un Président s’achevait par un banquet… républicain !

Histoire de permettre au premier magistrat de ce pays de rappeler combien la République est le meilleur de tous les régimes !

Le 13 août 1896, Laval eut droit à son banquet. A l'occasion de la visite officielle de l’élégant Félix Faure…

 

L’Echo de la Mayenne

C’est à 8 h 10 du soir que le Président se met à table, dans l’une des salles des Galeries de l’Industrie. A sa droite, le maire de Laval Victor Boissel ; à sa gauche, le ministre de l’Intérieur, M. Darlan.

Ces commensaux ont-il lu le menu des réjouissances qui les attendent ? Certainement. Comme, du reste, tous les lecteurs du numéro de L’Echo de la Mayenne du lendemain, qui a reproduit ce menu qu’on ne risque pas de trouver dans les réceptions officielles d’aujourd’hui où l’obsession du kilo en trop est dans toutes les têtes.

Car il s’agit d’un menu pantagruélique. Qu’on en juge !

Quel menu !

Mouton Rothschild et les autres

Et les vins ? Le moins qu’on puisse dire est qu’ils sont de qualité. En témoigne la liste suivante, qui fera rêver plus d’un palais : Sauternes, Bordeaux (blanc et rouge), Château Lamothe, Mouton Rothschild, Aloxe Corton, Chambertin, Château Lurs Saluce, Château d’Yquem, Veuve Cliquot…

Comme l’écrit le journaliste de  L’Echo de la Mayenne : « On fait le meilleur accueil aux plats servis par M. Messmer et l’entrain est général ! » Contrairement à son lointain successeur Jacques Chirac, Félix Faure a un appétit de moineau : « C’est à peine s’il goûte aux mets ; mais il boit avec plaisir du cidre, un bon cidre mousseux ! » (Mais l’article ne mentionne pas le nombre de verres que le Président but ce soir-là ! )

Vanter la République

Ces choses dites, passons maintenant au message que Félix Faure doit faire passer (son job, comme dirait son lointain successeur, Nicolas Sarkozy) : vanter le régime républicain que la France a adopté après la chute du Second empire…

C’est le maire de Laval qui, au dessert, après avoir essuyé sa longue barbe grise, prend la parole le premier pour rendre un hommage appuyé à la République « qui restera inébranlable contre toute attaque, car elle a pour elle et la force et le droit ». Il salue ensuite haut et fort la personne de Félix Faure dont la popularité tient autant à son élégance qu’au fait qu’il a été ouvrier tanneur dans sa jeunesse !

Victor Boissel

En cette période troublée (quatre gouvernements se sont succédé entre novembre 1893 et avril 1896 sans oublier l’Affaire Dreyfus, qui a débuté en 1894, etc.), Victor Boissel tient également à signaler que le conseil municipal de Laval, « entièrement républicain », tend, lui aussi, « à l’apaisement si nécessaire à notre cher pays ».

Il indique aussi qu’il faut toujours servir la France : « Si par ailleurs nous pouvons différer d’opinion, il ne saurait y avoir d’adversaires quand il s’agit de reconnaître l’intérêt de la Patrie ! »

Enfin , il lève son verre à la santé de Félix Faure, « l’élu de l’Assemblée nationale », qui se lève à son tour pour discourir une fois de plus sur les vertus d’un gouvernement républicain « intimement lié désormais aux destinées de la patrie ».

Monsieur Piednoir

Son discours achevé, le Président remet sa dernière légion d’honneur de la journée, à une personnalité lavalloise, M. Piednoir qui aura droit à cinq minutes d’ovation.

Vers 10 heures du soir, Félix Faure quitte les Galeries de l’industrie pour aller assister à la soirée de gala, dans une salle de la mairie. Puis M. Basset, artificier rue de la Paix, tire le feu d’artifice. Le Président prend congé de Laval à minuit précise, « emportant une impression durable de son voyage exceptionnel ».

L’Agence Havas

Sur ce point, le correspondant de l’agence Havas est catégorique : vraiment, Laval s’est distinguée entre toutes les villes de l’Ouest qui ont reçu la visite du Président Faure !

D’où la conclusion du journaliste de L’Echo de la Mayenne : « Nous paierons c’est entendu, nous paierons même très cher, mais nous aimons à entendre dire qu’on n’a pas jeté en vain notre argent ! »